Bâillements et tasses de thé
Il y a plusieurs qualités d'ennui au cinéma. L'ennui créatif, qui laisse le cerveau divaguer et rêvasser à mille autres choses plus intéressantes que le film. L'ennui productif, qui vous permet de vous concentrer sur le reste du programme de la journée, les courses à faire et les personnes à appeler après la projection. Et l'ennui agressif, devant des films énervants à force de bêtise, d'académisme et de platitudes.
Rares sont les oeuvres qui génèrent les trois types de baillement en même temps. Mrs Dalloway est de celles-là. Co-production européenne insipide jusqu'à l'écoeurement, cette histoire d'Anglais qui règlent de microscopiques problèmes d'intendance avant de donner leurs soirées respectives est puissamment mortifère. Au cours d'une journée qui se terminera par une réception pour quelques proches, Mrs Dalloway (Vanessa Redgrave) se remémore son passé. Flashbacks en rafale, sourires béats, robes blanc cassé et roses fanées, tout est apprêté et prévisible. Je défie quiconque de trouver une seule surprise dans ce film où tout semble recouvert d'une fine poussière anesthésiante. Les dialogues - adaptés d'une oeuvre homonyme de Virginia Woolf, voilà pour l'alibi culturel - font frémir tant ils alignent les mots d'auteurs et les constatations les plus imbéciles à propos de tout et de rien.
Un pareil ratage surprend de la part de la réalisatrice de l'émouvant Antonia's Line, Marleen Gorris. Personne n'est parfait.
Pascal Montjovent